Les chats ont de la veine : l’obscurité ne les empêche pas de lire. C’est comme ça qu’ils ont découvert nos faiblesses, en lisant dans le noir comme d’autres lisent dans les entrailles des moutons ou le marc de café. Mais le marc de café a l’avantage de permettre d’y voir clair, dans l’avenir, quand l’obscurité l’obscurcit. Quant aux moutons et leurs entrailles, force est de dire qu’ils finissent toujours par puer. La veine en est troublée.
Une chose est bien certaine : c’est maxime philosophique que d’invoquer la veine des chats. C’est une façon très profonde de dire notre malheur à nous qui en sommes privés. La spiritualité du propos le rend facile à digérer, et l’aruspice ne se soucie d’épices quand il y va de l’immoler, le chat.
Mais le poids véritable de la maxime n’est pas là. Ni le chat, ni sa veine et encore moins l’obscurité ne font sens en vérité. La philosophie du propos en témoigne : la vérité du sens en vérité ne se peut décréter. Elle doit être démontrée. Or, que nous dit l’auteur ? “Les chats ont de la veine” ? Supprimons les chats et supprimons la veine ; que nous reste-t-il d’autre que l’obscurité ?
Tout semble donc se concentrer et s’éclairer sur elle, et c’est bien là le piège, car c’est un peu vite oublier le “lire” ! Il faut dire aussi qu’il traîne à la fin, c’est bien malin. Il disparaît ainsi sous la mêlée, et se donnant en final, il prend des airs conclusifs. Et l’axiome en découle : si le chat lit, c’est qu’il sait lire ! Qu’importe les conditions…
On le voit, le sophisme n’est jamais bien loin quand il s’agit de battre le chat dans le sac.
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